Eva Europe

Le Pacte de Stabilité pour l’Europe du Sud-Est, signé le 10 juin 1999 à Cologne par les Ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne, est un projet visant à la stabilisation de la région des Balkans par le biais de trois domaines d’action : la démocratisation, la reconstruction économique et la sécurité. Le Pacte de Stabilité est une initiative de l’Union européenne, menée sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Depuis le début des années 90 plusieurs autres initiatives avaient déjà vu le jour.
a) Une première initiative, émanant, en novembre 1989, des Vice Premiers Ministres de l’Autriche, de la Hongrie, de l’Italie et de la Yougoslavie, a abouti au projet de coopération intitulé la «Quadragonale». En 1992, le projet est rebaptisé «Initiative centre européenne» (CEI) suite à l’élargissement de quatre à seize pays membres parmi lesquels l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, l'ex-République yougoslave de Macédoine, la Roumanie et la Slovénie. Créée au départ dans le but de développer la coopération politique, technique, économique, scientifique et culturelle entre les pays membres, la CEI vise surtout aujourd’hui à l’intégration de ces Etats dans l’Union européenne. Elle soutient particulièrement ceux qui n’en sont pas encore membres dans leur processus de rapprochement à l’Union européenne.
b) Quelques années plus tard, en 1993, M. Edouard Balladur, Premier Ministre français, propose un Pacte pour la Stabilité et la Sécurité en Europe. Son idée principale était d’organiser, sous l’égide de l’Union européenne, une conférence pan-européenne pour la paix et la sécurité en Europe ayant pour but de contribuer à la stabilisation des pays d’Europe centrale et orientale, susceptibles de s’associer, un jour, à l’Union européenne. La première conférence du Pacte, en mai 1994, devait aboutir à la conclusion d’une série d’accords bilatéraux entre les pays concernés réglant les problèmes de frontières et de minorités nationales. Le Conseil des Ministres de l’Union européenne décida finalement de limiter le nombre des pays participants au Pacte aux pays candidats à l’adhésion à l’Union. Lors de la Conférence finale, le 20 mars 1995, le Pacte est adopté par les 54 Etats participants. Il inclut des accords de bon voisinage entre la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie, ainsi qu’avec les pays voisins d’Europe orientale ou de l’Union européenne.
c) Inspirée par le premier Pacte de Stabilité de 1993 et dans la mouvance de l’accord de paix de Dayton (21 novembre 1995), une nouvelle initiative française, le Processus de stabilité et de bon voisinage en Europe du Sud-Est («Processus de Royaumont»), est lancée en décembre 1995. Elle vise à stabiliser la région et à améliorer les relations de bon voisinage en Europe du Sud-Est par le biais d’une série de projets initiés par la société civile. Aujourd’hui le Processus de Royaumont est intégré dans le Pacte de Stabilité.
d) En 1996, les Etats-Unis proposent un projet pour l’Europe de Sud-Est, le «South East Europe Co-operative Initiative» (SECI), dont le but est d’encourager la coopération entre les pays de la région de l’Europe du Sud- Est et d’aider à préparer l’adhésion à l’Union européenne. La SECI se veut un forum où les problèmes économiques et d’environnement sont discutés afin d’élaborer des actions et des plans communs. Ses pays membres sont l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, l’ex-République yougoslave de Macédoine, la Grèce, la Hongrie, la Moldova, la Roumanie, la Turquie, la Croatie et la Slovénie.
Face à la diversité de toutes ces initiatives M. Hubert Védrine, Ministre français des Affaires étrangères, propose, en février 1998, de définir un projet global. Un an plus tard, sous l’influence de la crise au Kosovo, la proposition française gagne en actualité. La communauté internationale se rend alors compte que, pour stabiliser la région des Balkans, il faut lui apporter un soutien économique, puisqu’un simple processus de réconciliation s’avère insuffisant pour résoudre les problèmes qui sont à la base des conflits dans la région. Lorsqu’en février 1999 se tient la conférence de Rambouillet pour le Kosovo, les Etats-Unis proposent une nouvelle initiative pour l’Europe du Sud-Est sous l’égide de l’OTAN et de l’Union européenne. L’Allemagne, assurant alors la Présidence de l’Union européenne, joue un rôle moteur dans l’élaboration du Pacte de Stabilité pour l’Europe du Sud-Est qui sera signé le 10 juin 1999. Le même jour, le Conseil de Sécurité des Nations Unies adopte la résolution 1244 sur le Kosovo. Le Pacte est solennellement consacré par les Chefs d’Etats et de Gouvernements des Etats membres de l’Union européenne au Sommet de Sarajevo, le 30 juillet 1999.
Le Pacte de Stabilité pour l’Europe du Sud-Est a pour objet de soutenir les pays de cette région dans leurs efforts pour promouvoir la paix, la démocratie, le respect des droits de l’homme et la prospérité économique afin de faire des Balkans une région stable et prospère. A partir de ces objectifs, le Pacte de Stabilité et la Déclaration du Sommet de Sarajevo prévoient à terme une intégration des pays des Balkans dans les structures Euro-Atlantiques (OTAN et Union européenne) et dans d’autres organisations internationales (Organisation mondiale du commerce, etc.). En effet, la participation à des organisations internationales ou européennes est perçue comme un facteur de stabilité, notamment parce qu’elle diminue le risque de voir éclater des conflits entre des pays participants.
Pour ce qui est de l’intégration dans l'Union européenne, il convient de distinguer deux groupes de pays : d’un côté, ceux comme la Hongrie, la Roumanie, la Slovénie et la Bulgarie qui sont déjà candidats à l’adhésion; d’un autre côté, l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie et l’ex-République yougoslave de Macédoine qui ne sont pas encore incluses dans ce processus. Pour ces derniers, une période de transition est envisagée pour leur permettre de construire des démocraties stables et prospères afin de se rapprocher des valeurs européennes. De cette façon ils pourront espérer une future adhésion à l’Union, laquelle est souhaitée par les Etats eux-mêmes.
Le Processus de Stabilisation et d’Association (SPA) est la principale contribution de l’Union européenne au Pacte de Stabilité. Proposé par la Commission européenne le 26 mai 1999, le Processus tend à développer l’actuelle “Approche régionale” de l’Union. Cinq pays sont concernés : Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, l’ex-République yougoslave de Macédoine et la République fédérale de Yougoslavie. Il comprend : des accords de stabilisation et d’association1 ; des mesures de commerce autonome ; une assistance économique et financière, une assistance budgétaire et un soutien à la balance des paiements ; une assistance à la démocratisation et à la société civile ; une aide humanitaire aux réfugiés ; une coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures ; un développement du dialogue politique.
Pour réaliser ces objectifs, le Pacte de Stabilité est composé d’une Table Régionale et de trois Tables.
La Table Régionale «passera en revue les progrès du Pacte, le fera avancer et supervisera la réalisation de ses objectifs » (Pacte, art. 12). Elle fonctionnera comme un «clearing house » pour toutes les questions de principe liées à la substance et à la mise en œuvre du Pacte. En outre, la Table Régionale assurera la coordination des activités émanant des Tables et les conseillera. Il y a trois Tables : la Table I se consacre à la démocratisation et aux droits de l’homme, la Table II à la reconstruction, au développement et à la coopération économiques, et la Table III s’occupe des questions relatives à la sécurité (Pacte, art. 14). Les Tables sont des instruments permettant d’entretenir et d’améliorer les relations de bon voisinage entre les pays de la région. Quant à leur fonctionnement, le Pacte définit en annexe quelques points fondamentaux, laissant à chaque Table une certaine latitude pour décider elle-même de sa structure et de son organisation interne. La Table Régionale et les Tables réunissent les participants du Pacte, c’est-à-dire les Etats, les organisations et institutions, et les initiatives régionales, dont la participation aux tables est volontaire. D’autres Etats, organisations internationales et institutions ont la possibilité d’être invités à participer au Pacte ou à devenir observateur (Pacte, art. 16).
Le Coordinateur spécial pour le Pacte de Stabilité est nommé par l’Union européenne, après consultation du Président en exercice de l’OSCE et des autres participants. Le Coordinateur spécial préside la Table Régionale et il est responsable de la promotion des réalisations du Pacte (Pacte, art. 13). Il travaille en étroite coopération avec les gouvernements et les institutions compétentes des pays, particulièrement ceux associés à l’Union européenne, ainsi qu’avec les organisations et institutions internationales concernées. Un Secrétariat assiste le Coordinateur dans l’accomplissement de ses tâches.
Enfin, il faut mentionner la «Conférence Régionale des Donateurs», qui réunit des représentants des gouvernements donateurs, des pays de la région de l’Europe du Sud-Est et des organisations internationales. Elle a pour fonction d’identifier les moyens de financement des activités du Pacte de Stabilité. Une première réunion a eu lieu les 29 et 30 mars 2000 à Bruxelles et l’organisation d’autres réunions est prévue dans le Pacte (Pacte, art. 41).